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La loi sur la transition énergétique définitivement adoptée au Parlement

Ce texte, porté par la ministre de l’écologie, traduit notamment la promesse de François Hollande de réduire de 75% à 50% la part du nucléaire dans la production électrique à l’horizon 2025.

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Publié le 22 juillet 2015 à 15h53, modifié le 22 juillet 2015 à 20h36

Temps de Lecture 5 min.

 

Le plus grand parc photovoltaïque de France, sur le plateau des Mées (Alpes de Haute-Provence), en mars 2015.

L’attente aura été longue, la gestation difficile. Mais le projet de loi de transition énergétique pour la croissance verte est arrivé à son terme. Il a été définitivement adopté par les députés, mercredi 22 juillet au soir, en dernière lecture, après qu’un nouvel objectif d’augmentation du prix du carbone a été fixé. Avec ce texte, présenté par François Hollande comme l’un des « grands chantiers du quinquennat », la France pourra s’afficher comme « exemplaire » en accueillant la conférence mondiale sur le climat de Paris (COP21) en décembre, se félicite la ministre de l’écologie, Ségolène Royal. Il s’agit pour elle d’un incontestable succès politique, même si son espoir d’obtenir un consensus des deux chambres parlementaires sur ce dossier emblématique a été douché.

Initialement annoncée pour l’été 2013, présentée en conseil des ministres voilà un an, débattue en première lecture à l’Assemblée voici dix mois, cette loi, bien qu’examinée en procédure accélérée, aura connu un cheminement laborieux, les sénateurs s’employant, en première comme en deuxième lecture, à détricoter l’ouvrage des députés. Pour l’essentiel, ceux-ci sont finalement revenus au document originel. Ce qui n’empêche pas Mme Royal de saluer, au terme de 150 heures de débats parfois houleux, une « coconstruction » par les deux assemblées.

Nucléaire, bâtiments, transports

Ambitieux dans leurs objectifs, les 66 articles dessinent pour le milieu du siècle un système énergétique plus sobre, plus durable et moins nucléarisé : réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 (par rapport à 1990) et division par quatre en 2050 ; diminution de moitié de la consommation énergétique finale en 2050, avec un premier palier de 20 % en 2030 ; baisse de la part des fossiles de 30 % à la même échéance ; promotion des renouvelables pour atteindre 32 % de la consommation d’énergie et 40 % de la production d’électricité à la même date.

S’y ajoute la réduction de la part du nucléaire dans le bouquet électrique à 50 % « à l’horizon 2025 », contre environ 75 % aujourd’hui. Un calendrier conforme à l’engagement du chef de l’Etat, contre lequel la droite a farouchement bataillé, les sénateurs souhaitant que la baisse du poids de l’atome soit visée « à terme », sans date butoir.

De même, la puissance totale du parc électronucléaire est plafonnée à son niveau actuel de 63,2 gigawatts (GW), afin de contraindre EDF à fermer, lors de la mise en service de l’EPR de Flamanville (Manche), des réacteurs de puissance équivalente. Les deux unités de Fessenheim (Haut-Rhin) sont en ligne de mire, même si elles ne sont pas citées. Le Sénat, lui, voulait porter le plafond à 64,85 GW, pour avoir le beurre et l’argent du beurre, c’est-à-dire les 58 réacteurs actuels et le nouvel EPR.

Pour « verdir » la France, deux grands leviers seront utilisés. D’abord, la rénovation énergétique des bâtiments, qui représentent près de la moitié de la consommation énergétique du pays. Elle sera obligatoire pour tous les bâtiments privés résidentiels, tandis que les nouvelles constructions de l’Etat et des collectivités territoriales devront être « à énergie positive et à haute performance environnementale ».

Ensuite, les transports « propres », ce secteur étant responsable de plus du quart des émissions de gaz à effet de serre. Lors du renouvellement de leurs flottes de véhicules, l’Etat et les établissements publics devront opter, « dans la proportion minimale de 50 % », pour des modèles « à faibles émissions ». Il en va de même pour les taxis et les loueurs de voitures, à hauteur de 10 % de leur parc. De plus, les entreprises d’au moins cent salariés devront élaborer un « plan de mobilité » favorisant le recours aux transports en commun et au covoiturage.

Objectif « 100 000 emplois » en trois ans

Tous ces chantiers, comme le développement des filières renouvelables (éolien, solaire, énergies marines ou biomasse), le recyclage des déchets (les volumes mis en décharge devront être divisés par deux en 2025), ou l’interdiction des sacs en plastique jetables à partir de 2016, doivent permettre, assure Mme Royal, « la création de 100 000 emplois dans la croissance verte » en trois ans. Pour les accompagner, elle promet, sur trois ans également, 10 milliards d’euros d’aides publiques, sous forme notamment de crédits d’impôt, de prêts à taux zéro ou de bonus, afin d’encourager la rénovation thermique des logements ou le remplacement des vieux véhicules diesel par des voitures électriques.

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Lire aussi : Comment sera financée la transition énergétique ?

Cette loi fait-elle pour autant de la France « la nation de l’excellence environnementale » vantée par Mme Royal ? Tout dépendra des décrets d’application – les premiers seront publiés « dès la rentrée 2015 », promet la ministre –, mais surtout de deux dispositifs qui définiront réellement la feuille de route de la transition énergétique, autrement dit sa mise en œuvre concrète.

D’abord, la stratégie nationale bas carbone, qui doit fixer, par décret et par périodes de cinq ans, les « budgets carbone » – c’est-à-dire les plafonds d’émissions à ne pas dépasser – dans les différents secteurs d’activité (transports, bâtiments, industrie, agriculture).

Un coup de théâtre s’est produit mercredi matin en commission spéciale de l’Assemblée nationale : en dépit de l’avis défavorable du gouvernement, les députés ont majoritairement repris un amendement du Sénat, soutenu par de nombreux parlementaires socialistes et par les écologistes. Il prévoit une augmentation de la taxe carbone (aujourd’hui de 14,5 euros la tonne), avec un objectif de 56 euros la tonne en 2020 et 100 euros la tonne en 2030. Cela, afin de donner « un signal-prix efficace » aux industriels et de les inciter à réduire leurs émissions. En lecture finale, la ministre a changé son fusil d’épaule et a donné un avis favorable à l’amendement, qui a donc été adopté.

Ensuite, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui, arrêtée elle aussi par décret, déterminera par étapes la trajectoire à suivre pour les différentes filières énergétiques. C’est elle qui permettra vraiment d’atteindre, ou non, les objectifs en matière de renouvelables et de nucléaire. La première PPE doit couvrir la période 2016-2018, ce qui nécessiterait donc qu’elle soit établie avant la fin de cette année. Or, un amendement gouvernemental, adopté au Sénat et repris en commission spéciale, repousse sine die cette programmation, les délais étant jugés trop serrés. Les « consultations » seront seulement « engagées avant le 31 décembre 2015 ». En clair, la traduction de la loi dans les faits attendra.

Au final, « le projet de loi donne un cap utile et fixe des objectifs intéressants, mais l’essentiel reste à faire », réagissent le Réseau action climat et le Réseau pour la transition énergétique. A leurs yeux, « décaler la publication de la première PPE, c’est reculer encore le moment des choix et c’est un très mauvais signal à quelques mois de la COP21 ».

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