La NSA (l'Agence nationale de sécurité américaine) espionne-t-elle les entreprises françaises ? Si oui, transmet-elle des informations confidentielles aux entreprises américaines, qui sont leurs concurrentes, leurs clientes, leurs fournisseurs ou leurs partenaires ?
En septembre, alors que l'affaire Snowden prenait de l'ampleur, le lieutenant général James Clapper, qui supervise l'ensemble des services de renseignement américains, publia un démenti formel sur ce point : « Une chose que nous ne faisons pas, comme nous l'avons dit maintes fois, est d'utiliser nos outils de renseignement extérieur pour voler les secrets commerciaux de sociétés étrangères pour le compte de sociétés américaines, (... ) dans le but d'améliorer la compétitivité internationale de nos entreprises ou d'accroître leurs bénéfices. » Fin octobre, une délégation de députés européens en visite à Washington a reçu les mêmes assurances.
A Paris, Alain Juillet, président du Club des directeurs de sécurité des entreprises, n'en croit pas un mot : « La NSA pratique l'espionnage industriel et commercial, c'est une évidence. Pendant la guerre froide, les Etats-Unis avaient construit un immense système d'interception électronique, tourné vers le bloc soviétique. Après la chute de l'URSS, les responsables de Washington ont décidé de réorienter en partie cette machine gigantesque vers le renseignement économique, en visant le monde entier. » M. Juillet connaît bien cet univers, car il a mené une double carrière d'homme d'affaires et de responsable des services de renseignement français. Il est aujourd'hui partenaire d'un cabinet d'avocats d'affaires parisien, affilié au réseau américain Orrick.
Il rappelle que, dès les années 1990, le gouvernement des Etats-Unis a créé un organisme baptisé « Advocacy Center ». « Chaque année, il sélectionne une centaine de contrats internationaux en cours de négociation, et collabore avec les entreprises américaines concernées pour les aider à remporter ces contrats par tous les moyens y compris l'intelligence économique. Le centre est en relation étroite avec les agences de renseignement », assure M. Juillet.
Il vous reste 74.26% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.