Les factures d’électricité de millions de Français vont être revues à la hausse pour rattraper celles de 2014 et 2015. Les tarifs réglementés augmenteront en effet de manière rétroactive à la suite d’une décision du Conseil d’Etat qui a annulé un arrêté qui fixait les prix au 1er novembre 2014.
La ministre de l’environnement et de l’énergie, Ségolène Royal, a annoncé sur Europe 1, jeudi 16 juin, qu’il devrait y avoir un réajustement de l’ordre de « 1,50 euro par mois pendant dix-huit mois, soit une trentaine d’euros » pour les consommateurs. Explications.
Comment les prix peuvent-ils augmenter rétroactivement ?
Cette situation particulière est le fruit d’une série de décisions contradictoires :
- Initialement, les tarifs réglementés de l’électricité devaient augmenter de 5 % au 1er août 2014 ;
- En juin 2014, le gouvernement avait décidé de geler cette hausse et de mettre en place un nouveau mode de calcul de ces tarifs. Désormais, c’est la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui propose une évolution une fois par an (auparavant, ces tarifs pouvaient évoluer en janvier et en août) et c’est le gouvernement qui tranche ;
- Un arrêté tarifaire avait finalement fixé une hausse de 2,5 % des tarifs au 1er novembre 2014 ;
- Le Conseil d’Etat a annulé cet arrêté, mercredi 15 juin, car le montant d’une partie des tarifs réglementés de l’électricité a été jugé insuffisant.
Le Conseil d’Etat a donc ordonné aux ministres de « prendre, dans un délai de trois mois, un nouvel arrêté fixant une augmentation rétroactive » pour la période comprise entre le 1er novembre 2014 et le 31 juillet 2015. Une manière de compenser la relative faiblesse de la hausse de 2,5 % en novembre 2014.
Quels sont les tarifs concernés ?
Les tarifs réglementés sont ceux d’EDF, fixés par les pouvoirs publics. Il existait auparavant plusieurs types de tarifs en fonction de la situation du client (particulier, entreprise, etc.). La décision du Conseil d’Etat vise les tarifs « bleus résidentiels », qui concernent environ 28 millions de ménages en France, et les anciens tarifs « verts » des entreprises qui consommaient le plus d’électricité (ces derniers ont disparu au 1er janvier).
Ce sont ces deux tarifs qui seront revus à la hausse, après coup. Les tarifs « jaunes » des entreprises et « bleus non résidentiels » de l’époque ne sont, eux, pas concernés.
Une hausse de la facture de plus d’un quart depuis 2011
Que représentent les hausses successives du prix de l’électricité sur le long terme ? La CRE nous a communiqué des chiffres prenant en compte deux cas de figure :
- Un client résidentiel qui consomme 2 400 kilowatts-heure (KW/h) par an (sans chauffage).
- Un client résidentiel qui consomme 8 500 kW/h par an (avec chauffage) et dont 54 % de la consommation se fait en heures pleines.
On constate un surcoût non négligeable. Depuis 2006, la facture a augmenté de 37 % à 42 % selon les cas et celle de 2011-2016 est dans une fourchette de 26 % à 29 %. Et ce sans tenir compte des futurs rattrapages.
Dans l’absolu, un coût pas si élevé
Selon EDF, ces hausses successives restent néanmoins insuffisantes pour compenser l’évolution de ses coûts de production de l’électricité sur le long terme. L’opérateur doit aussi assumer de nombreux investissements, comme la modernisation de ses cinquante-huit réacteurs nucléaires en France, coût estimé à 51 milliards d’euros d’ici à 2025, ou la mise en place des trente-cinq millions de compteurs Linky, d’Enedis (ex-ERDF), estimée à 5 milliards.
Au deuxième semestre 2015, le prix du kWh pour les ménages français resterait nettement au dessous de la moyenne européenne, selon Eurostat.
Le groupe énergétique, qui appartient à 85 % à l’Etat, plaide donc régulièrement pour des hausses des tarifs plus importantes.
La CRE a également proposé en 2015 une augmentation bien supérieure à celle retenue par le gouvernement. Elle estimait qu’il faudrait relever le tarif pour les particuliers de 3,5 % à 8 % pour rattraper l’insuffisance des relèvements de prix décidés depuis 2012. La hausse a finalement été limitée à 2,5 %.
Voir les contributions
Réutiliser ce contenu