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«Cash Investigation» : Lidl affirme que le reportage ne reflète pas ses pratiques

En 2012 Lidl France a annoncé l'abandon du hard discount. MYCHELE DANIAU/AFP

VIDÉOS - La direction France de la chaîne de magasins de grande distribution revient sur l'enquête diffusée mardi soir dans l'émission d'Elise Lucet qui pointe les techniques redoutables mises en œuvre pour maximiser la production des salariés. Conséquence, dans les Bouches-du-Rhône, des salariés d'un entrepôt Lidl sont en grève.

C'est un coup de pub dont Lidl France se serait bien passé. Alors que depuis 2012, l'entreprise allemande de hard-discount a entrepris une mutation pour monter en gamme, ne lésinant pas sur les moyens, tant en communication qu'en investissements, l'enquête de «Cash Investigation» diffusé mardi soir et réalisée par Sophie Le Gall, étrille les conditions de travail au sein de l'enseigne bleu et jaune.

Conséquence directe de cette émission, une cinquantaine de salariés d'un entrepôt au Rousset (Bouches-du-Rhône) sont en grève ce mercredi. Ils dénoncent leurs conditions de travail et le licenciement, selon eux abusif, de l'un de leurs collègues. Ils expliquent avoir été «soulagés» de voir les conditions de travail dans l'entreprise rendues publiques par le reportage diffusé sur France 2 qui dénonce des cadences infernales pour maximiser la production des employés, au détriment de leur santé, tant physique que morale.

La direction de Lidl ne le voit pas du même oeil. «Le reportage ne reflète pas nos pratiques. Ce qui est montré dans le reportage, ce sont des situations isolées» a répété Denis Marolt au Figaro. «Au contraire, nous sommes convaincus que le succès de l'entreprise va de pair avec l'amélioration des conditions sociales et de travail des salariés» a-t-il assuré. «On est conscients qu'il y a des efforts à faire pour améliorer les conditions de travail des salariés dans l'entreprise», a-t-il toutefois bien voulu concéder.

Comme des robots

Parmi les pratiques dénoncées par l'émission d'Élise Lucet, la commande vocale qui règne en maître dans les entrepôts. Une machine dicte aux préparateurs de commandes l'allée où il doit se rendre pour prendre la marchandise, puis le nombre de colis qu'il a à porter. Ce dernier répond «ok» lorsqu'il a fini de charger. Les salariés naviguent ainsi sept heures par jour dans l'entrepôt et ne peuvent prononcer que 47 mots, ceux compris par la machine. A la pause, des employés racontent être obsédés par cette voix métallique et disent avoir l'impression de devenir des robots.

«On utilise ce système depuis 7 ans et il a déjà fait l'objet de plusieurs adaptations. Dans le reportage, on voit que cet outil fait augmenter les cadences, qu'il n'y a plus d'espace pour l'humain. C'est faux. Nos cadences sont en baisse depuis 10 ans. Par ailleurs, nous avons aussi aménagé des espaces de détente plus conviviaux», se défend auprès du Figaro, Denis Marolt, le vice-président en charge des relations humaines et sociales chez Lidl, que l'on voit en plateau répondre à Elise Lucet.

Huit tonnes par jour

L'enquête montre aussi le poids ahurissant (jusqu'à 8 tonnes) des marchandises manipulées quotidiennement par les préparateurs. Des employés racontent avoir physiquement du mal à suivre la cadence. «Le métier de préparateur de commandes est un travail physique et on est conscient qu'il y a des conséquences sur la santé, reconnaît Denis Marolt. On essaie de faire en sorte de baisser le poids des colis lourds. Tout notre travail consiste à investir dans l'outil de travail, comme dans des engins de levage, à hauteur variable» fait-il encore valoir.

Autre technique mise en place par l'enseigne pour optimiser les rendements de ses équipes: la polyvalence imposée aux caissières, ce qui permet d'éradiquer les temps morts. Ainsi, on voit une caissière qui au lieu d'attendre les clients, passe de sa caisse à la mise en rayon, puis au ménage du magasin. «Alterner les tâches pour nos caissières permet de réduire les cas de TMS troubles musculosquelettiques, fait valoir le vice-président en charge des relations humaines et sociales chez Lidl France. Nous n'avons pas fait le choix de l'automatisation.»

«Ça va être à feu et à sang»

Une autre séquence, particulièrement choquante, montre encore l'envers du décor. Des extraits d'un échange oral entre un manager qui menace un chef de magasin sont diffusés. Les mots et le ton sont particulièrement choquants. «Si je viens et que le magasin est mal tenu, je te promets que toi et moi on se verra toutes les semaines. (...) Ça va être à feu et à sang (...). Je te mettrai six jours de mise à pied à longueur de temps, tu vas mourir», entend-on. Pour Denis Marolt, «ces extraits dévoilés sont complètement inacceptables et nous comprenons l'emoi qu'ils ont suscité. Ce sont des propos isolés, contraires à ce que nous voulons représenter» souligne-t-il. «D'ailleurs, cette personne n'est plus dans l'entreprise», assure-t-il.

Manifestement gêné, Lidl continue de tout faire pour soigner son image. En interne, la direction avait d'ailleurs publié il y a quelques jours un communiqué avant la diffusion de l'émission, avertissant les salariés au sujet de ce «magazine télévisé, réputé pour ses méthodes polémiques».

Lidl serait-il victime de son expansion rapide? Il faut dire que l'entreprise, au chiffre d'affaires de 8 milliards d'euros par an, est passée en 10 ans de 14.000 à 30.000 salariés. Tous les ans, 100 magasins sont transformés, passant en moyenne, de 800 à 1200 m², ou déménagent. 400 à 450 millions d'euros devaient être investis pour mettre le parc de magasins à niveau.

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